17 juin 1857Je pensais que ce séjour en province chez tante Joséphine serait d'un ennui mortel, et j'avais bien tort. Tout ici est charmant. La campagne, les champs, le parc, la propriété sont plus pittoresques que je ne saurais dire.
Bien sûr, ma tante et ses amies ne cessent de me tourmenter au sujet de la nécessité du mariage, disant que ma beauté fanera bientôt et qu'aucun homme ne voudra plus de moi. Elles convient chaque jour à notre table les partis les plus en vue parmi le voisinage. Mais, chaque jour, j'échoue à leur faire la conversation. Je mange le rouge aux joues, et je n'offre pour réponse que des balbutiements troublés. Ils doivent penser que je suis bien sotte.
Je sais pourtant que le temps est après moi. J'aurais bientôt vingt-trois ans, un âge avancé pour un premier hymen. Je ne cesse de prier le Seigneur de me donner le courage d'être une bonne jeune fille à marier, puis une bonne épouse. Puisse-t-il exaucer mes prières.
J'aurais aimé sortir ce matin pour poursuivre mes croquis des chevaux de tante Joséphine, mais le temps est à l'orage. Monter ces bêtes racées m'inspire grande crainte. Pourtant, j'aime à les regarder. Elles sont majestueuses.
Je suis lasse du printemps et de ses pluies capricieuses. L'été viendra bientôt et je pourrai continuer mes esquisses.